samedi 31 octobre 2015

Les gros laids de la baston intergalactique


C'est le dernier volet de la série - vous comprendrez bien qu'après ça, c'était plus la peine de continuer...

Ce dernier volet de notre odyssée de la baston laide sur Megadrive est consacré à trois jeux qui ont décidé que la terre était un tatami trop petit pour eux.
Trois compétitions de coups de latte réunissant des combattants d'outre-espace.
Trois specimens de nanarderie aggravée.
Trois perles débilocentriques qui ont fait de la grosse laideur leur thématique principale.

Il s'agit de Mighty Morphin Power Rangers, Fatman (aka, Tongue of the Fatman, aka Slaughtersports) et Fighting Masters.

Fait notable, tous trois sont des Versus Fighters pur jus, mais seul le premier suit les préceptes de Street Fighter II - les deux autres étant sortis respectivement en 1990 et 1991. On pourra donc en outre se délecter, les concernant, d'un système de combat original.



Mighty Morphin Power Rangers (Banpresto, 1994)

On commence pas mal avec un jeu de Versus Fighting dont les héros sont les Power Rangers - c'est à dire rien d'autre qu'une déclinaison des Bioman. Donc forcément, quand on est cultivé, on y joue avec la parodie "Biouman" des inconnus en tête.Les gens de ma génération seront bien sûr déçus qu'il ne s'agisse pas des vrais Biouman... Mais ne faisons pas trop la fine bouche, la différence n'est que superficielle: on a du bon gros monstre en caoutchouc qui fait couic-couic, du mecha-de-l'espace qu'on appelle en jouant du pipeau, et du grand méchant diabolique qui tire les ficelles de la dimension Zboub. De ce point de vue là, il n'y a pas à se plaindre, Banpresto a fait du bon fan-service, et on se surprend à moitié à sourire en regardant les petites cinématiques entre les combats du mode 1 joueur.

"Tut-tulu-tut-tut-tuuu!" On a régulièrement droit à la musique des Power Rangers. Et on sourit malgré soi.

Du point de vue de la réalisation, ça ne vole vraiment pas haut, surtout pour un titre paru en 1994, mais ça tourne de manière tout à fait honnête - et se montre plutôt comique lorsque c'est raté, comme ce bruit super improbable que fait la pétoire laser des Rangers.


Le Power Ranger noir flingue le minotaure en caoutchouc comme Blier flingue les chinois dans les Barbouzes: "ptuh!".

Le système de combat s'adressait de toute évidence aux plus jeunes et aux novices, avec seulement deux boutons d'action (coup rapide/coup fort) et des coups spéciaux demandant les manipulations les plus habituelles et simples à réaliser (quarts de tour, direction maintenue/direction opposée, martelage de bouton...). Il est juste dommage que leur détection soit un peu tatillonne, d'autant que les bonhommes se manient sinon bien. Mais dans l'ensemble on tient un jeu adapté au contrôleur de base de la console, et vraiment facile d'accès, ce qui est bien ce qu'on cherche! 
Le revers de la médaille, c'est évidemment qu'on en fait rapidement le tour, d'autant que sur les 12 bonhommes jouables en versus, la moitié sont des Power Rangers qui ne diffèrent que peu les uns des autres...

En mode 1 joueur, une fois l'ennemi battu, il est agrandi par le grand méchant! Il faut alors le rebastonner au Megazord.

Mais ne faisons pas les difficiles: il ne faudrait tout de même pas oublier qu'on n'espérait pas un vrai bon jeu. Au final, ce Power Rangers est plutôt une bonne pioche pour l'usage semi-décadent qu'on veut en faire: il est simple d'accès, adéquatement débile pour qui accroche au thème, et ne coûte pas cher à l'achat. 



Fatman (Sanritsu, 1990)

Fatman, lui, boxe dans une toute autre catégorie, et on ne peut pas dire qu'il y ait tromperie sur la marchandise. Qu'il s'agisse de l'artwork de l'original d'Activision sous MS-DOS, de celui des versions MD et Genesis, du "scenario", des designs et biographies des personnages, je pense que la couleur est clairement annoncée: tout sent le nanard de compétition, et celui qui s'assume, les coudes solidement appuyés sur le comptoir!

Quelqu'un a eu l'idée de cet habile montage. Pas sûr que ce soit le même qui s'est mis les billes dans le nez.

Par exemple, le personnage principal, Rex, est un moustachu à longue tresse diplômé de Harvard, amateur de lancer de nains et de petits rongeurs crus. Non, je ne l'invente pas, c'est dedans. Et ce n'est que l'un des 8 combattants qui sont venus de toute la galaxie pour tenter de ravir le titre de champion d'arts-martiaux détenu par Mondu, un ignoble adipeux Jabba-the-huttesque en couche-culotte qui cogne avec la langue qui lui sort de la bouche qu'il a dans le bide.
Convenez tout de même que ça cogne relativement dur. 

Lui, c'est Rex. Il crache du feu dans le cul des filles, comme ça, froutch.

Aussi, il ne fallait pas s'attendre à ce qu'une connerie pareille se voie consacrer des moyens de développement fabuleux. Pour un titre survenu relativement tôt dans la vie de la Megadrive, ça pourrait cependant être pire; d'un point de vue strictement graphique en tout cas, ce n'est pas désagréable. L'animation est en revanche hachée, et la musique pique aux oreilles tout en étant diaboliquement entêtante.

Rex il se tombe souvent, gné. Heureusement il se fait même pas mal.

Mais surtout, le système de jeu, les contrôles et le moteur de combat sont mal fagotés comme c'est pas permis, et réservent de délicieux moments de n'importe quoi: ballets de corps se télescopant dans les airs, rebonds inattendus, succession de pains dont on se rend tardivement compte qu'on les porte dans le vide, cancels-into-rien, coups spéciaux qu'on fait juste pour admirer leur nullité, adversaires qui se tournent le dos, voire quittent l'écran, ou déclenchent simultanément un pouvoir d'invisibilité pour déconner... Jouer à Fatman, c'est une alternance de phases où on s'efforce authentiquement de dompter des contrôles super foireux pour faire moins pire que son adversaire... Et de phases où on fait de la merde exprès. Moi j'ai trouvé ça rigolo, même sans être à deux grammes, mais c'est bien parce que j'ai été conquis par la débilité esthétique du truc. Le top, ce serait de réussir à en organiser un petit tournoi, un jour.

Malheur au vaincu: un thrashark viendra le croquer à travers le plancher.

Au final, ce que je regrette vraiment avec ce jeu, c'est que les menus soient aussi rudimentaires et n'offrent pas plus d'options et de possibilités dans les affrontements. Les autres défauts, ce n'est pas la peine de les énumérer - et si on les corrigeait, ce ne serait plus Fatman. Maintenant, attention, qu'il n'y ait aucune ambiguïté: ce n'est absolument pas un bon jeu, et il n'y pas de raison objective de le recommander davantage que Rise of the Robots. Je le pense cependant bien plus susceptible de parler à la fibre perverse des amateurs de séries Z. De ce point de vue là, c'est définitivement un titre fort de cette série.



Fighting Masters (Treco, 1991)

Après Kyukyoku Tiger, puis Street Smart, ça fait le troisième jeu signé du redoutable Treco dont je parle ici....
Ca a quelque chose d'effrayant. Et cette fois, il ne s'agit pas d'une adaptation, attention, mais d'une création originale!

Alors d'emblée sachez qu'on n'est pas vraiment déçu: Fighting Masters, c'est de la dynamite.
On allume la console, et le titre apparaît en envoyant de l'éclair au bruit improbable suivi d'une musique tout aussi étonnante.
On appuie sur "start", pressé d'en voir davantage, et d'en apprendre bien sûr un peu plus sur l'enjeu de cette baston, qui est d'ampleur galactique, oui-oui: il va falloir péter la gueule à tous les top fighters du cosmos, sinon ce sera la fin de tout...
Et cette terrible histoire nous est contée sur une musique qui, là, est absolument d'anthologie.



Une fois que sous l'effet de la stupeur, on l'a écoutée jusqu'au bout de l'introduction bouche bée, la pupille dilatée et le conduit auditif sanguinolent, on recouvre tant bien que mal ses esprits... Et on commence à se faire une idée de l'envergure de ce titre: il est monumental.

Le héros humanoïde a des grands pieds, et il les met où il veut, Little John.

Les personnages sont terrifiants -terrifiants!- de mongolisme. Leur graphisme est enfantin et grossier. Leur animation ridicule. Je vois que ça à dire: c'est complètement con. Limite on dirait un jeu indie de mecs qui ont voulu se poiler un petit coup tellement les concepts sont idiots, la réalisation dépouillée, et le gameplay simple.

Aha, le satyre-cyclope à gants de boxe a placé un pain dans la morue-morin à tonfas - il faut vite tenter une prise!

En voici les principes: avec B on tape, avec C on saute, avec A on ne fait rien. Quand un pain touche, l'adversaire sera souvent immobilisé un temps suffisant pour qu'on s'approche et qu'on fasse une projection - et c'est là qu'on fera l'essentiel du dégât. Si on est proche d'un bord de l'écran, on a alors une chance d'en faire davantage encore en faisant heurter la paroi à l'adversaire.

Notre sympathique cyclope envoie valdinguer Beowolf (!) dans le mur, ce qui occasionnera un impact supplémentaire.

La différence entre les bonhommes se joue pour l'essentiel sur les hitboxes et les prises. Ca ne pisse pas loin, mais ça suffit à faire des affrontements pas déplaisants - et tendus, en fait! Ce serait limite pas mal du tout si les bonhommes se valaient à peu près, et surtout si on n'avait pas un désagréable sentiment d'aléatoire et d'injustice dans l'exécution des prises. On a souvent du mal à comprendre pourquoi c'est l'un des combattant plutôt que l'autre qui l'envoie valdinguer, et c'est parfois franchement frustrant.

Il n'empêche: Fighting Masters permet de se foutre sur la gueule avec des personnages d'une débilité rare en un temps de prise en main record. De plus, même s'il n'est disponible qu'en import, sa cote est suffisamment basse pour qu'on se laisse aller à être décadent. Définitivement un titre à shortlister!



Les navets intersidéraux tiennent leurs promesses!


Le palmarès final

Difficile de délimiter pour tout le monde la frontière entre un mauvais jeu et un mauvais jeu rigolo, mais il y a selon moi quand même quelques titres qui se détachent. Les irrécupérables, d'abord. 
Rise of the Robots est de cette triste engeance. 
Shaq Fu et Primal Rage ont eux ceci de triste qu'ils ne parviennent à tirer leur épingle du jeu ni comme bon jeu, ni comme navet: qu'on recherche l'un ou l'autre, il y a plusieurs choix bien meilleurs!
Les 6 autres titres ont tous, à leur petit niveau quelque chose de mauvais (voire même de bon!) à apprécier qui les rend parfaitement envisageable comme divertissement débile occasionnel entre buveurs de bière. Si je devais me hasarder à les classer je ferais malgré tout de Fighting Masters le King of the Gros Laids, car c'est un bon compromis entre bêtise et accessibilité. Fatman et Street Smart méritent les honneurs également, l'un pour sa débilité à peine croyable, l'autre par pure nostalgie des années Van Damme / Arcade / SNK.


Ne me demandez pas où sont Ball Z, Beast Warriors, ou Heavy Nova: vous connaissez la réponse.


1 commentaire:

  1. Je l'avais choper Fighting Masters et comment dire, ben tu as bien résumé le bouzin!
    Cypher

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